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Épisode 3 : Métaztazed (ou pas) 2018-06-15 false En attendant de savoir si t'es dans la merde... ou pire encore
métastases
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Dans l'épisode précédent j'ai détaillé la consultation d'annonce. Pour rappel, j'ai donc un très joli adénocarcinome (cancer) de l'oesophage. La tumeur fait entre 6 et 7 centimètres et elle est située au niveau du cardia (jonction entre le bas oesophage et l'estomac). Je suis donc (un peu) dans la merde.

J'ai également expliqué que mes ganglions axillaires avaient l'allure d'une girlande de Noël au Pet Scanner, au choix :

  • Les cellules cancéreuses ont commencé à se propager dans l'organisme et le circuit lymphatique est atteint : le cancer est « métastasé », c'est la merde et pire encore.

  • Les ganglions sont inflammés parce qu'ils sont actifs et en lutte contre un virus, une infection, bref, un truc mais qui n'est pas cancéreux : le cancer est localisé, c'est la merde mais ça pourrait être pire.

Maintenant, passons à la suite.

Attente, anxiété et biopsie

En sortant d'une consultation de ce genre, t'es plutôt assommé. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que je ne sais que partiellement ce que j'ai et que pendant un petit mois, je vais devoir passer d'autres examens et attendre les résultats. Psychologiquement, il faut s'armer de patience, de courage et ne pas dérailler sinon tu perds totalement pied et c'est le début de la fin.

Et la vie continue donc en parallèle tu dois :

  • l'annoncer aux proches
  • remplir une petit tonne de papier (ALD, hospitalisation, mutuelle, truc, bidule, machin, CHOSE)
  • orchestrer les RDV avec un médecin pour avoir un arrêt de travail
  • gérer tes transports à l'hôpital
  • avertir ton employeur
  • continuer à vivre

Heureusement, j'ai été très bien accompagné (merci) pendant toute cette période.

Pour savoir si les ganglions sont touchés, il faut prélever les ganglions : nouvelle hospit, nouveau passage sur le billard, nouvelle biopsie.

La Biobiopsie (et plus encore !)

Je suis rapidement recontacté pour la biopsie. Pour commencer, je vais rencontrer le chirurgien qui va me suivre pendant l'intégralité de mon traitement. Le premier rendez-vous avec lui est assez anecdotique. Il me réexplique pourquoi je suis là et comment va se passer la biopsie (spoiler, il entaille, il retire, il rafistole).

Bref, la date d'hospitalisation pointe le bout de son nez. C'est parti, direction l'hôpital, j'arrive dans le service, on m'installe en chambre double et on me fournit l'uniforme du patient. Je passe sur le billard donc c'est douche à la bétadine, puis à poil sous la blouse. T'as beau le tourner dans le sens que tu veux, t'as systématiquement le cul à l'air avec ce machin, ça suinte la classe. Comme toujours à l'hôpital, il y a le passage chiant ou tu attends et ça ne loupe pas : j'attends. Quelques heures plus tard, un brancardier arrive, c'est parti, je descends au bloc. Et comme à chaque fois, je me retrouve à attendre dans le couloir, à moitié à poil sur mon lit, que l'anesthésiste se pointe pour me poser ses questions. Entre temps, des infirmières viennent me « préparer ». Elles sont deux pour un rasage expédié de l'aisselle gauche avant l'opération et l'une d'elle lâche :

Ah mais en fait ça va, vous avez déjà fait une GROSSE partie du boulot !
Par contre je vais pas m'occuper de la droite ni de la barbe ahahaha !

En plein milieu des couloirs du bloc, en rigolant, ah bah merci, ça me met vachement à l'aise.

Donc bon, il faut quand même finir le travail et j'ai le droit à un coup de rasoir sur l'aisselle gauche.

Rah et depuis que je suis descendu j'ai cette envie de pisser et elle commence à me taper sur le système. Quand l'anesthésiste arrive, je réponds « oui, non, oui, non, non, oui » le plus rapidement possible et je finis par lui exprimer mon envie pressante. 10 minutes plus tard je reçois un pot à pisse, sauf que moi, au milieu du couloir, dans un lit, avec tout le monde qui passe et qui rigole, bah je peux pas pisser ! C'est bloqué le machin, ça sort pas. Donc 5 minutes plus tard, elle re-revient et je lui explique que c'est pas possible, faut faire autrement. Elle m'autorise à me lever pour aller aux chiottes. Super, elle m'aide, mais j'ai toujours ma blouse et je suis toujours à poil donc si je me lève, c'est l'éclipse lunaire totale, et elle se permet de me le faire remarquer. Dans ma tête c'est :

MAIS BORDEL TU CROIS QUE JE LE SENS PAS L'AIR FRAIS SUR MON CUL ? TU
CROIS QUE JE SUIS PAS COURANT QU'IL EST VISIBLE ? J'AI DÉJÀ FAIT UNE
CROIX SUR MON INTIMITÉ PAS LA PEINE DE ME LE FAIRE REMARQUER À NOUVEAU

Et ce qui sort de ma bouche c'est :

Je peux avoir un drap s'il vous plait ?

pfffff... j'ai même le droit au brancardier pour aller pisser, sait-on jamais, je pourrais sortir dans la rue le cul à l'air ? 30 secondes plus tard, délivrance, je pisse.

En revenant le chirurgien m'attends dans le couloir

Bonjour
Bonjour
Ça va ?
Ça va et vous ?
Bien merci
Bon on va faire la biopsie et j'ai aussi ajouté une coelioscopie
De ?
Je vais vous gonfler le ventre avec de l'air puis je vais aller voir l'intérieur avec une caméra qui passera par le nombril, vous êtes d'accord ?
Heu, bah, heuu, oui ?

Merci de prévenir, on est à 3 minutes de passer dans le bloc et j'apprends qu'il va y avoir deux gestes. Super surprise, j'adore ! J'ai pas mon téléphone ni internet, j'ai pas le vraiment le temps de regarder exactement ce que c'est ni les effets secondaires (qu'il n'évoque pas). YOLO, on verra plus tard.

On m'installe dans la salle d'opération. L'anesthésiste arrive, ça bouge un petit peu puis on me met masque à oxygène pour me détendre. Elle me dit qu'elle va injecter le produit anesthésiant et que ça va pas être agréable (comme d'hab) et c'est pas agréable (comme d'hab), ensuite rideau.

Pouf, salle de réveil, j'ai super mal à l'aisselle gauche, normal on m'a charcuté. Mon ventre à doublé de volume, je suis gonflé comme un dirigeable. Après une bonne heure, je remonte en chambre, la journée se termine.

La nuit est extrêmement difficile, j'ai tellement mal que je mets des heures à m'endormir puis rideau. Dans la soirée/nuit l'infirmière se pointe pour « voir les cicatrices » et la, c'est l'openbar de l'année, elle soulève la couette puis la blouse. En deux secondes, je me retrouve la zgeg à l'air pendant 30 secondes, RIP mon intimité, mais au moins, mon cul ne sera pas jaloux.

Le lendemain, avant de rentrer, le chirurgien repasse pour regarder les cicatrices, tout est « ok », il a bien prélevé les ganglions, la coelioscopie lui a permis d'explorer le ventre, il a vu la tumeur, c'est opérable, bonne nouvelle. Je rentre en début d'aprem et il me faudra bien une semaine pour retrouver la mobilité du bras gauche et deux semaines pour finir de dégonfler. Le gros effet secondaire de la coelio c'est l'air restant qu'il faut expulser et il n'y a pas 50 sorties (besoin d'un dessin ?) l'autre souci, c'est que l'air remonte et appuie sur les épaules, ça donne l'impression de porter un sac de 100kg tout le temps et que la clavicule va péter dans la minute, franchement pas top. Courage et patience, jusqu'à l'arrivée des résultats.

Consultation d'annonce, le retour

Ouf, Jour J, deuxième consultation avec le gastro-entérologue, je vais enfin avoir la réponse à la grande question de l'univers et du reste :

LES GANGLIONS SONT SAINS !!!!!

Intérieurement c'est fêté comme une petite victoire. Un peu de chance dans ma malchance, c'est beau non ? Le pire est évité !

Très rapidement, le cancérologue enchaîne sur la suite. C'est parti, maintenant que je sais ce que j'ai, je suis dans le traitement et plus dans l'attente. Vous allez surement me croire (oui, sinon pourquoi lire ce que je raconte ?), savoir ce qui va m'arriver est un réel soulagement.

Le traitement

Le traitement va s'organiser en deux parties. La première c'est l'alliance de la chimiothérapie et des rayons, découpée en une première cure de chimio, un mois de séances de rayons, une rebelotte : une cure de chimio. Le seconde c'est une grosse opération pour retirer la tumeur et entre les deux, une petite pause et des examens pour vérifier l'évolution de la maladie.

Pour une cure chimio, le protocole sera :

  • 2 jours/1 nuit d'hospitalisation1 pour le premier produit : du cisplatine, très toxique
  • 5 jours à la maison avec un diffuseur portatif pour le second produit : du 5FU, toxique mais pas trop

Au milieu de tout ça, j'aurai aussi les rayons :

  • 2 séances pour calibrer la machine
  • 5 séances par semaine dès que la chimiothérapie commence pour des séances d'environ 15 minutes1

Ouais, ça fait beaucoup d'informations à digérer d'un coup. Mais le cancérologue m'a fourni un audacieux planning qui récapitule tout et il a aussi ajouté la liste des effets secondaires de la chimio, en bas du planning, comme ça quand t'es sur de ne pas oublier ce qui t'attend quand tu le colles sur ton réfrigirateur :

  • modification de la formule sanguine
  • fatigue
  • nausées
  • vomissements
  • la chiasse ou la constipation, au choix
  • perte de cheveux
  • perte fertilité
  • perte d'audition
  • gencives qui saignent
  • anémie
  • perte d'appétit
  • et j'en passe

Pour finir, c'est

Merciaurevoiretboncourage.

Si je le condense ici aussi c'est pour tenter de retranscrire à quel point les consultations assomment le patient en même pas 10 minutes.

Mais bon, j'vais pas me plaindre, je sais ce qui m'attends.


  1. KANCER.CLUB PREMIUM MEMBER TIP : retenez bien ça, vous rigolerez plus fort dans les prochains épisodes ↩︎